L'Australien Eddie Jones, entraîneur des finalistes malheureux en 2003, a pris sa revanche sur les Anglais, par procuration. Devenu cet été, un peu par hasard, le conseiller technique du sélectionneur sud-africain Jake White, il a, par de petites touches et en trouvant les mots justes, permis aux talents enfouis dans les lignes arrières boks d'éclore.
 Toutes ces perles, certes plus ternes hier soir, associées à la robustesse légendaire du pack devaient mener les Springboks au titre, malgré l'opiniâtreté anglaise. Avec au sein de ce pack, le monument Os Du Randt, sacré pour la seconde fois, 12 ans après, oui 12 ans après 1995, sur ses terres.

Épreuve de force et
concours de chandelles

 On craignait que l'habituelle trajectoire des Boks serait contrariée par le XV de la Rose. Ce fut bien le cas. Jusqu'ici, les Sud-Africains ont surtout brillé sur les ballons de récupération, devenant en la matière un copier-coller des All Blacks. Mais face à des Anglais pourtant plus joueurs qu'à l'accoutumée, de ballons de récupération, il n'y a guère eu.
 La première période se résume ainsi à une terrible épreuve de force entre paquets d'avants et à un grand concours de chandelles allumées au niveau des trois-quarts.
 L'Afrique du Sud a toutefois le bon goût de lancer cette finale peu avant le repos sur une grande attaque initiée par deux de ses joyaux, Steyn et Pietersen. D'où un avantage mérité au changement de côté : trois pénalités à une. On se contente de ce qu'on peut.

L'Australien s'est senti
seul au monde

 La reprise apporte cependant son lot d'émotions et de sueurs froides à l'arbitre-vidéo Stuart Dickinson. L'Australien s'est senti seul au monde au moment de devoir statuer. Après la percée plein champs du centre anglais Tait, le pied de Cueto a-t-il traîné en touche avant qu'il n'aplatisse ? Pas évident. « Oui », estime Dickinson, les Boks s'en sortant avec une seconde pénalité concédée (9-6).
 Comme au premier tour, même lieu, même adversaire, l'Angleterre perd ensuite sa flèche privilégiée Jason Robinson. Un premier signe. Après une heure de jeu, les Anglais sont toujours dans le match. Le XV de France sait à quoi on se risque dans ce cas...
 Mais les Springboks sont plus solides que les Coqs. Le futur Perpignanais Montgoméry, la fiabilité même, meilleur marqueur de la compétition (105 points), frappe une quatrième fois. De son coup de pied de mammouth, François Steyn enfonce le clou sur un passage à vide anglais soi-disant volontaire (15-6, 62e'). Froide efficacité à défaut de séduire.

Cette fois, Wilkinson
ne sauvera pas les siens

 Lorsque l'arbitre Alain Rolland ignore un passage à vide "sud-af" cette fois, les 20 000 Anglais dans le stade se disent que, définitivement, l'Irlande est l'ennemie de l'Angleterre. Le XV de la Rose rate le coche en vendangeant une touche à 5 m de la ligne (68e'), puis Wilkinson échoue sur un drop de 45 m (71e').
 Cette fois, le maître Jonny ne délivrera pas les siens. Mais en sacrant l'Afrique du Sud, les dieux de l'ovalie ont un tant soit peu sauvé leur planète.