Jour de Foot, télé footre?

Samedi soir, 23 heures et des brouettes, je rentre de Geoffroy-Guichard. Comme d?habitude, j?allume la télé et je mets anal +. J?attends le résumé du match du soir, Saint Etienne ? Nice, pour revoir les actions du match. Enfin, cela c?est plutôt ce que j?espère.

Les premiers résumés défilent, de nombreux blablas aussi. Enfin, voilà la séquence tant attendue. Mon attention redouble. Je me redresse, attiré par le petit écran, prêt à m?enivrer encore de l?ambiance du chaudron. Cela commence par trois images des tribunes, sans pour autant montrer les tifos (Dommage !). Suivent les trois buts de la rencontre avec les ralentis (dernière passe et but uniquement). Puis nous admirons une envolée de Janot à la dernière seconde (Janot, le goal que Domenech attend de voir marquer un but pour le sélectionner au poste d?attaquant !). Et enfin, nous entendons Frédéric Antonetti (Reconnaissance éternelle) et capitaine Sablé exprimer les banalités d?après match. Loin de l?ivresse attendue, je me retrouve avec la gueule de bois.

Mais une surprise m?attend. Anal a pointé une caméra sur un supporter membre des IS 98 (une confrérie de supporters non ultras). Je me réjouis d?avance. Cette fois, c?est sûr, on va en prendre plein les oreilles et profiter de l?originalité et de la diversité des chants stéphanois. Quelle riche idée que de nous plonger dans le Kop et de nous faire partager les frissons de la Nord. Mon c?ur s?emballe? encore pour RIEN : le grand néant. Aucun frisson, aucun chant, aucune âme. Notre pauvre ami a l?air d?une quenelle perdue à la confluence du Rhône et de la Saône. On ne ressent aucune passion, on ne le voit pas vibrer. On nous livre seulement ses commentaires après chaque but, tel un Thierry G. ou un Guy R. Bref, le reportage sonne creux et ne présente aucun intérêt. Il n?est en tout cas, ni représentatif d?une soirée qui a vu les Verts s?imposer 2 à 1 dans le Chaudron, ni à la hauteur de l?ovation reçue par l?équipe au coup de sifflet final. Soit l?ingénieur du son et ses micros ont été dépassés par la puissance du Kop Nord, soit les auteurs du reportage ont un QI d?huître. Le résultat est minable et sans rapport avec la soirée que je viens de vivre au stade. Navré, je zappe.

Le lendemain, vers 11h20, c?est T Fin qui nous réchauffe les plats avec le même résumé de match. Sans digression sur les tribunes, 20 secondes d?images et puis on passe à la suite. C?est pas mal pour une émission d?une heure !

OLas, à la télé aujourd?hui, un match se résume à un but, à un tir sur le poteau ou à un arrêt décisif. La tactique, le fonds de jeu, le terrain et les joueurs (hormis quelques exceptions érigées en vedettes), n?ont plus leur place. Pour cela, il reste la Radio, et encore.

Depuis la dernière Coupe du Monde, T Fin, Anal +, France b?ufs et M si, ont institutionnalisé le foot réalité. Chaque semaine, nous avons droit au Match du siècle, avec sa légende, sa dramaturgie, et ses stars. Vive les bandes annonces dignes d?Hollywood et les stars du ballon qui ne tournent pas rond. Cet été, ce fût la saga Ribéry en Allemagne (un grand bonjour à toute la famille !). Il y a un mois, la tension de la coupe de la ligue nous était révélée par des battements c?urs sur les ralentis (J?en ai encore la chère de poule !). La semaine dernière, nous avions droit à un hommage à l?équipe de France 98 avant un monumental France-Grèce (Garder les copies de cette grande soirée de football, elle vaudront de l?or dans quelques années). Et chaque week-end, nous bénéficions des états d?âmes des uns et des autres, ainsi que des avis autorisés de leurs familles ou de consultants tous aussi extraordinaires les uns que les autres. Aucune des vicissitudes de la dure vie de footballeur, entraîneur, dirigeant ou journaliste ne nous échappe (Bon mariage Estelle et bonjour à tes voisins Zizou).

Le ballon en revanche, on a du mal à le suivre. Il devient virtuel (encore plus que sur les consoles). Les tabous et les lieux communs se multiplient : arbitrage, décisions de la Ligue, place des supporters, équipe de France, sécurité dans les stades, argent, vidéo... Il ne faut rien dire et laisser faire ; tout va s?arranger par enchantement. Les esprits sont anesthésiés par des images et des interventions inutiles (salut Grande Moustache) ou mercantiles (vive le merchandising). Le grand cirque sportif et médiatique s?emballe dans une fuite en avant permanente, de plus en plus éloignée du rectangle vert. Jusque là, tout va bien...

Sauf pour moi, fidèle supporter depuis plus de vingt ans et simple amateur d?un sport qu?on appelle encore football. Mais moi, comme vous, je ne compte pas. Alors je prie pour que la balle revienne au centre et je crie sans retenue : OLFP, TV, allez vous faire FOOTRE !